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13 novembre 2007

Les opérateurs télécoms craignent d'être dépecés par Bruxelles

Viviane Reding, Commissaire européenne à la Société de l'information doit présenter mardi de nouvelles mesures pour réguler le secteur des télécoms. Les opérateurs historiques et les nouveaux entrants redoutent le pire.

Viviane Reding peut se poser des questions. Déjà peu appréciée par les opérateurs depuis mobiles depuis qu'elle leur a imposé une baisse de prix de l'itinérance (roaming), la Commissaire européenne à la Société de l’information, qui doit présenter mardi de nouvelles mesures pour réguler le secteur des télécoms, a réussi l’exploit de se mettre à dos, tout à la fois, les opérateurs historiques, les alternatifs et les régulateurs nationaux. La disposition la plus commentée est sans nul doute la séparation fonctionnelle. Ce concept d’apparence obscur masque une réalité particulièrement simple : la scission des anciens monopoles en deux entités, avec d’un côté le réseau, accessible à tous les opérateurs sans discrimination, et de l’autre les services. Expérimenté depuis 2005 en Grande-Bretagne sur BT, ce « remède » trouve des avocats à Bruxelles mais aussi en France, puisque Free, notamment, y est favorable. Le numéro trois français de l’ADSL aimerait recourir, où le juge nécessaire, aux réseaux de fibre optique déployés par France Télécom. La pilule a forcément un peu de mal à passer chez les opérateurs historiques. Directeur exécutif chargé des questions de régulation de France Télécom, Jacques Champeaux évoque « beaucoup de bonnes raisons économiques pour éviter cette sorte de séparation ». Ainsi, avec la mise en place de la séparation fonctionnelle, les opérateurs perdraient toute « incitation à investir ». L’ETNO, un réseau qui fédère les anciens monopoles européens, estime que cette décision aura des retombées à long terme irrémédiables, et chiffre les pertes en investissement dans les infrastructures à plus de 10 milliards d’euros au cours des dix prochaines années. Les syndicats craignent aussi que ces décisions aient des conséquences en terme d’emploi. Dans un communiqué publié lundi, la CFTC table sur 600.000 à 800.000 licenciements chez les opérateurs historiques, qui ne transféreraient pas toutes leurs forces de travail dans les deux nouvelles entités, mais en profiteraient pour faire le ménage. « Ce serait une exécution sommaire du secteur des télécommunications en Europe », écrit le syndicat, pour qui tous les opérateurs deviendront à terme des MVNO, autrement dit des opérateurs virtuels sans réseau avec des effectifs réduits au strict minimum. Du côté de Bruxelles, on cherche à relativiser ces critiques. Viviane Reding, rappelle-t-on, n’imposera en aucun cas la séparation fonctionnelle. La commissaire souhaite plutôt que ce remède puisse être utilisé en dernier recours par les régulateurs nationaux, la où tout a échoué. Or, en France, l’Arcep a déjà manifesté son scepticisme au sujet de cette mesure, estimant la régulation « au fil de l’eau plus pertinente ». Or, dans le même temps, la Commission s’apprête justement à proposer une réduction des secteurs examinés par le régulateur. Ces marchés « pertinents » devraient passer de 18 à 7 et perdre notamment des domaines régulés dans la téléphonie portable. Si la décision témoigne d’une concurrence améliorée sur les marchés concernés, elle ne fait cette fois plus les affaires des opérateurs alternatifs. L’Ecta, association qui regroupe plusieurs de ces groupes européens, dont Neuf Cegetel, est « absolument opposée » à un allégement des contrôles dans le mobile qui « empêcherait les nouveaux acteurs d’entrer dans la compétition ». La mesure n’est pas non plus vue d’un bon œil par les régulateurs, qui ont un autre sujet de préoccupation. Mardi, Viviane Reding devrait évoquer également la création d’un de l’autorité européenne du marché des télécoms, l’ETMA. Ce « super-régulateur » s’est déjà attiré les foudres du président de l’Ofcom, le pendant de l’Arcep en Grande-Bretagne, qui souhaite privilégier une structure déjà existante groupant depuis 2003 les 27 régulateurs européens. Mais selon le porte-parole de Viviane Reding l'ERG n'a obtenu aucun résultat concret, tandis que les questions transfrontalières des régulateurs nationaux sont souvent « influencés par leur gouvernement, ou trop proches des opérateurs ». C’est donc dans cette ambiance particulièrement tendue que Viviane Reding formulera ses propositions mardi. En plus de ces trois grands chantiers, elle devrait aussi se prononcer sur les droits des consommateurs, par exemple lors des changements d'opérateur, et sur le dividende numérique. Après validation par le Parlement européen et les 27 Etats membres, toutes ces diverses mesures pourraient entrer en vigueur début 2010