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14 octobre 2009

Panne d’Internet au Niger : La dépendance du Niger envers la fibre optique brisée du Bénin



Depuis le mois de juillet 2009, le Niger et ses pays avoisinants comme le Bénin, le Togo, et le Nigeria connaissent une panne d’Internet suite à la rupture du câble sous-marin SAT-3,


un câble qui relie l’Europe à l’Afrique du Sud, en passant par plusieurs pays ouest africains, leur permettant ainsi d’avoir accès à l’Internet à haut débit.


Le SAT-3 n’atterrit pas directement au Niger qui n’a pas de côtes maritimes, mais il atterrit au Bénin, pays limitrophe par lequel le Niger s’est interconnecté et qui a évidemment été lui aussi affecté par cette rupture.


Le Niger et ses voisins se retrouvent donc sans connexion et le Niger, assujetti au Bénin pour se reconnecter.


En l’absence de renforts conséquents, les Nigériens sont pratiquement impuissants face à cette impasse – 70% de la bande passante du pays passe par le Bénin.


Pourquoi le Niger se fie-t-il alors exclusivement au Bénin pour se connecter, alors qu’une solution satellitaire de rechange aurait pu minimiser la situation de rupture?


La dépendance du Niger par rapport aux infrastructures béninoises peut être attribuée au fait que le Bénin, pays côtier, possède la fibre optique SAT-3 qui fournit la connexion haut débit du Niger, lui permettant ainsi de passer de 25Mb/S à 155Mb/S.


Celle-ci est gérée par l’opérateur historique national, SONITEL et sans-elle, le Niger serait obligé d’avoir recours à des connexions satellitaires pour le moment pratiquement inexistantes et surtout, inabordables, et donc impensables comme système quotidien pour se connecter. Impuissant face à cette situation,


c’est maintenant un jeu d’attente pour le Niger, pendant que le bateau câblier dépêché en mer par le Bénin et le consortium SAT-3 à partir de l’Afrique du Sud entreprend les réparations.


La leçon tirée de cette faillite technique


Bien que pour l’instant, le Niger doive attendre les réparations du câble – qui aux dernières nouvelles a été rétabli – nous pouvons espérer qu’une leçon aura au moins été tirée de cet incident technique ;


« Cette rupture du câble a permis de se rendre compte de la vulnérabilité du dispositif de télécommunications au Niger.


Il fait aussi ressortir l’importance de disposer d’un back up de rechange et surtout la nécessité de construire le tronçon fibre optique avec le Burkina Faso », explique M. Adamou Iro, expert juriste manager en Technologies Informatiques & Télécoms à Niamey. Le SAT-3 est en effet le seul câble disponible pour se connecter à l’Internet à grande vitesse.


Les seules autres options possibles, si la SONITEL ne veut pas payer des sommes exorbitantes pour une connexion de rechange par satellite, seraient de trouver un accord avec les opérateurs télécoms des pays voisins sur des moyens alternatifs.

Présentement, la SONITEL n’a aucun plan d’urgence en place. Selon M. Iro, la raison pour laquelle la SONITEL ne dispose pas de ce type de plan est un problème de gestion interne et de ressources humaines.


La SONITEL devrait normalement être sanctionnée par l’Autorité de régulation des télécommunications (ARM) pour rupture de service public, puisqu’une solution de rechange ou une minimisation de la panne auraient raisonnablement dû être prévues – il est du devoir de l’ARM et du gouvernement de veiller à ce qu’un plan stratégique et un dispositif soient conçus et disponibles pour faire face à de telles situations.


Le fait qu’une société de cette envergure n’ait rien de prévu en cas d’urgence reflète un manque de compétences et de ressources humaines ou tout au moins une responsabilité technique injustifiable.


Pourtant, les problèmes de connexion au Niger vont au-delà d’un câble brisé – en fait, presque 80% des communautés rurales au Niger n’ont toujours pas accès à des services de communications de base comme le mobile ou la téléphonie fixe, et donc encore moins à l’Internet.


Néanmoins, le taux du téléphone mobile est monté à 19,5% depuis 2005, où il était à 4,6% et le taux dans les zones rurales à peine desservies est monté de 1,4 à 12,9 % pour cette même période, selon l’Institut Nigérien de la Statistique (INS).


Malgré ces avancées, la situation des télécommunications au Niger est loin d’être satisfaisante.


Selon une recherche menée par M. Iro dans le cadre du projet Communiquer pour influer en Afrique centrale, de l’Est et de l’Ouest (CICEWA) pour l’Association pour le progrès des communications, des problèmes fondamentaux se trouvent au niveau de la Déclaration de Politique des télécommunications datant de 1999 et qui est aujourd’hui complètement dépassée quant aux objectifs que se sont assignés les pouvoirs publics dans le secteur.


Ce qui a eu pour conséquence le timide développement du secteur dans le pays, avec notamment des infrastructures inadéquates ; le niveau des prix pratiqués par les opérateurs en sont le résultat.

Un pas vers l’action

Il est évident que des lacunes dans le secteur des télécommunications ont été constatées, mais curieusement, les réformes entamées en 1999 n’ont pas permis d’opérer les changements nécessaires. Pourquoi et à qui peut-on imputer ces manquements?


La réforme du secteur des télécommunications au Niger et surtout la privatisation de l’opérateur historique SONITEL ont été un échec.


Dans un effort de modernisation des infrastructures dans le pays et de création d’un secteur sain dans un environnement concurrentiel, la SONITEL a entrepris un processus de réformes de plus de 13 milliards de Fcfa (29 millions de dollars US).


Mais les infrastructures sont restées obsolètes et, comme l’explique M. Iro « la SONITEL a même résilié certains contrats avec ses fournisseurs à l’international comme les providers satellitaires qui auraient dû servir de solution de rechange au moment de la panne de la fibre optique SAT-3 ».


Douze ans après les réformes, la population nigérienne, l’État du Niger et le personnel de l’opérateur historique, se trouvent face à un constat d’échec qui aurait pu être évité, si tous les acteurs avaient joué leur rôle en toute responsabilité.


Les plaintes, aussi bien des consommateurs que des pouvoirs publics, sur la privatisation de l’opérateur historique, reprochent au repreneur stratégique LAICO (l’organe qui a été mis en charge de privatiser et restructurer la SONITEL) de ne pas avoir respecté son cahier de charges.


Beaucoup de zones, surtout en milieu rural, n’ont pas été couvertes ; les tarifs de communication n’ont pas baissé de façon significative et restent hors de la portée de la grande majorité des Nigériens.


La réforme de libéralisation du secteur n’a pas pu véritablement instaurer la concurrence au profit du consommateur, et la télé densité est restée relativement faible.


Le Collectif des Syndicats du secteur des télécommunications qui n’entend pas rester muet face à cet état de fait a plusieurs fois tiré sur la sonnette d’alarme et a fini par conclure aussi sur l’échec de la réforme et surtout de la privatisation de la SONITEL.


L’une des plus évidentes conclusions des Nigériens face à cette situation est que : La gestion des investissements actuellement réalisés ne tient compte ni des intérêts technologiques encore moins des intérêts économiques et financiers de l’État du Niger, des populations et du personnel de la SONITEL.


M. Iro écrit dans son rapport : « En effet ni l’Autorité de régulation, ni le ministère de la Communication n’a pris l’initiative d’élaborer et faire adopter les textes réglementaires d’application indispensables à la sanction effective des opérateurs qui ne respectent pas leurs cahiers de charges.


C’est pourquoi à ce jour plusieurs mises en demeure adressées par l’Autorité de régulation aux différents opérateurs de télécommunications sont restées pratiquement sans effet et non suivies de sanction ».


Si tel est le cas avec la concurrence et la régulation du secteur des télécommunications, il n’est donc pas surprenant que ces derniers n’aient pas non plus pu prévoir comment minimiser la dépendance du pays aux infrastructures béninoises pour la connexion au haut débit en cas de panne.


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