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28 août 2006

Fracture numérique : Alcatel investit en Afrique

Fin 2005, l’Afrique comptait 100 millions d’abonnés à la téléphonie mobile mais encore peu d’abonnés à Internet. Aujourd’hui, l’enjeu consiste à réduire la fracture numérique dans les régions les plus enclavées du continent. Alcatel, déjà implanté depuis plusieurs décennies en Afrique, investit ces nouveaux marchés émergents. Explications avec Thierry Albrand, responsable chez Alcatel des projets destinés à réduire la fracture numérique.


Quelle est la stratégie d’Alcatel en Afrique ?Thierry Albrand :
Tout d’abord, l’Afrique est une implantation historique du groupe. Il s’agit pour Alcatel d’un investissement à long terme. L’Internet constitue notamment un relais de croissance et de développement grâce aux différentes applications économiques et sociales potentielles. L'objectif est de réduire la fracture numérique tout en étant fortement créateur de valeur ajoutée au niveau local. Faciliter les communications permet également d’éviter l’exode rural dans des pays où les transports ne sont pas développés.
Quelles sont les applications sociales ?
Thierry Albrand : Dans le domaine de la santé par exemple, nous développons grâce à l’imagerie médicale des services de prévention et de soins à distance, qui permettent de soigner les habitants des zones reculées sans qu'ils aient à se déplacer à l’hôpital. Au Sénégal, pays dont le gouvernement est très impliqué dans le développement des nouvelles technologies, nous travaillons sur la mise en place d’un projet pilote avec la société Global Imaging afin de lutter contre la tuberculose en reliant un hôpital de province avec un hôpital de Dakar où des radiologues peuvent effectuer des diagnostics précis de radios pulmonaires transmises par le réseau haut débit installé dans le cadre de ce projet.
Outre les bénéfices économiques, quelles sont les autres motivations du groupe ?
Thierry Albrand : Réduire la fracture numérique répond également à un enjeu d’image. Nous pouvons de cette manière toucher l’ensemble de la population, car nos offres ne sont pas réservées exclusivement à une élite, mais aussi aux différentes catégories sociales, comme les pêcheurs, les agriculteurs, les commerçants, etc. Cela suppose par ailleurs de savoir développer des services et des contenus spécifiques, dans la mesure où une large partie de la population reste analphabète. Pour les agriculteurs et pêcheurs du Sénégal, notre partenaire Manobi a développé un service qui leur permet, à partir d'un simple téléphone GSM, d’avoir accès aux informations sur les marchés de leurs produits. Ils peuvent ainsi vendre leur production à des conditions plus équitables. Ce procédé a également été développé en 2005 en Afrique du Sud, où des agriculteurs d’une zone reculée ont accès, via un téléphone mobile et en temps réel, aux prix des denrées agricoles pratiqués sur les principaux marchés de gros de Johannesburg et de Pretoria situés à plusieurs centaines de kilomètres.
Que représente l’Afrique en terme de marché économique?
Thierry Albrand : L’Afrique constitue un marché émergent de 850 millions de personnes. Par ailleurs, lorsque la bulle Internet a éclaté, c’est notre présence dans les pays en développement qui nous a permis de maintenir un bon niveau d’activité. Trop miser sur les pays développés peut s’avérer dangereux, il faut savoir diversifier les risques.
Les partenariats publics-privés sont-ils une solution viable ?
Thierry Albrand : Réduire la fracture numérique est une démarche globale, nous ne nous contentons pas de fournir les outils. Alcatel est désormais très implanté au Nigeria, au Ghana, au Sénégal et en Côte d’Ivoire, mais ce développement est favorisé par des partenariats publics/privés faisant intervenir des gouvernements locaux et des institutions comme la Banque Mondiale, car cela nécessite des investissements considérables. Alcatel est ainsi membre fondateur de l’initiative "Connecter le monde" lancée par l'Union Internationale des Télécommunications (UIT). Par ailleurs, il faut convaincre les gouvernements et la population, assurer la formation et les services adaptées aux besoins locaux, le tout à un coût accessible !
Comment convaincre la population de l’utilité de ces nouveaux services ?
Thierry Albrand : Il s'agit de proposer, en partenariat avec des acteurs locaux, des associations et autres parties prenantes, des solutions qui répondent aux besoins locaux en associant technologies, services et financements. Parallèlement à cela, nous avons crée des centres d’incubation pour les projets économiques locaux liées aux nouvelles technologies. Alcatel a monté deux centres, l'un à Tunis et l’autre au Caire avec pour mission de fournir l’assistance nécessaire avec nos ingénieurs. Trois autres centres seront créés d’ici fin 2008.

Propos recueillis par Véronique SméeMis en ligne le :28/08/2006