Apple et Google défient les géants du mobile
Par Olga Kharif
BusinessWeek
Les efforts déployés par les géants de la technologie pour concevoir des logiciels adaptés aux téléphones mobiles pourraient enfin donner l'avantage aux éditeurs, au détriment des opérateurs - et même de Symbian et de Microsoft.
Craig Hockenberry, développeur de logiciels pour Mac, n'a jamais été attiré par la création d'applications pour téléphones mobiles. "C'est beaucoup de négociations pour peu d'argent", en comparaison de ce que rapporte la conception de logiciels pour ordinateurs, dit-il, dans la mesure où les programmeurs ont toujours dû satisfaire une interminable liste d'exigences établies par les opérateurs mobiles, les fabricants de combinés et autres éditeurs de logiciels.
Les possesseurs de téléphones mobiles se comptant par milliards, les fabricants de logiciels petits et grands lorgnent depuis longtemps sur le marché du mobile, qu'ils considèrent comme une formidable opportunité de croissance. Toutefois, ils ont découvert que les marges bénéficiaires généreuses que génère la création de logiciels pour les ordinateurs individuels ou les fournisseurs d'accès à l'Internet sont bien plus minces au royaume du portable. S'ils doivent rarement payer un fabricant d'ordinateurs ou un fournisseur d'accès quand leurs programmes sont utilisés sur leurs machines où leurs réseaux, les éditeurs de logiciels voient de nombreuses mains se tendre à chaque coin de l'industrie du sans fil pour réclamer leur dû.
Ainsi, un développeur qui crée une sonnerie pour téléphone portable à partir d'une chanson existante ne percevra que 5 % des recettes que sa vente génère, les opérateurs s'en réservant une proportion très importante, en plus de celle revenant aux artistes et aux studios. Si ce ne sont pas eux qui prélèvent leur part, ce sont les fabricants de combinés ou le créateur du système d'exploitation de l'appareil. Parfois, ils sont même plusieurs à soutirer des recettes complémentaires aux développeurs d'applications. "L'écosystème n'est pas sain", explique Daren Tsui, directeur général de mSpot, éditeur de logiciels pour mobiles qui a choisi de s'allier aux opérateurs pour installer ses applications musicales et vidéo sur les téléphones portables. Ces contrats signés avec six compagnies nord-américaines ont généré deux millions d'abonnés mensuels. Cependant, malgré le succès de sa société, M. Tsui estime que "la communauté des développeurs crie pratiquement famine".
Apple crée une ouverture
Aujourd'hui, Apple et Google tentent d'apaiser un peu leur faim. En février, la marque à la pomme publiera un kit de développement logiciel ( BusinessWeek 16/10/2007) permettant aux programmeurs indépendants de concevoir des applications pour l'iPhone. Comme cet appareil coûte environ 140 euros de plus qu'un téléphone normal, ceux qui l'achètent sont susceptibles de souscrire à des prestations mensuelles haut de gamme plus onéreuses. Les développeurs espèrent qu'Apple et ses partenaires exclusifs (les opérateurs mobiles) auront à coeur de satisfaire cette demande enproposant des services et des applications conçues et réalisées par des tiers. Le gâteau étant plus gros, ils espèrent que le géant informatique et ses partenaires leur en réserveront un plus beau morceau.
L'ouverture de l'iPhone, fruit de mois de lobbying intensif de la part des programmeurs, est également plus alléchante pour ces derniers. Dans la mesure où l'iPhone est construit sur le même système d'exploitation que les ordinateurs Macintosh, la transition n'en sera que plus facile pour les concepteurs familiarisés avec les outils de développement Mac.
Quand le kit de développement aura été mis à disposition de ses destinataires, Craig Hockenberry, entre autres, compte réaliser une version pour l'iPhone de Twiterrific, une application Mac permettant aux utilisateurs du réseau social Twitter.com de lire et d'afficher des posts. "D'ici au mois de février, on pourrait assister à un raz-de-marée de logiciels iPhone", nous a indiqué Richard Doherty, directeur du cabinet de conseil The Envisioneering Group.
Google est sur les rangs
Dans le même temps, Google devrait lancer un nouveau système d'exploitation pour appareils mobiles, dénommé gPhone, afin d'étendre à ce marché sa très profitable activité de recherche et de publicité ciblée. Dans le cadre de cette stratégie, Google publiera un kit de développement logiciel pour dynamiser le développement d'applications et de services tiers innovants qui devraient attirer les consommateurs vers les appareils fonctionnant sous gPhone.
L'une des fonctionnalités de cette plate-forme, dénommée gPay, devrait, en permettant aux utilisateurs de payer leurs services par texto, simplifier le commerce pour les fournisseurs tiers. Aujourd'hui, les opérateurs font en sorte que le paiement des transactions passe par la facture mensuelle de leurs abonnés, prélevant près de la moitié des recettes pour jouer ce rôle d'intermédiaire pourtant indésirable entre consommateurs et développeurs. Si Google introduit un système de facturation alternatif moins coûteux pour ces derniers, "nous pourrions vraiment nous épanouir", déclare M. Tsui, de mSpot.
Google pourrait également lever les obstacles et les charges financières auxquels les éditeurs sont confrontés en offrant un réseau sans fil alternatif sur lequel la sélection d'applications disponibles pour les usagers ne sera pas étroitement contrôlée par les opérateurs mobiles. La firme américaine a récemment annoncé qu'elle pourrait se porter acquéreuse de licences de téléphonie mobile au début de l'année 2008 pour mettre sur pied, probablement avec un partenaire, un nouveau réseau sans fil n'imposant aucune restriction quant aux applications utilisables par les abonnés.
Les petits développeurs comptent en bénéficier
Si l'iPhone continue de gagner en popularité, notamment lors de son introduction prochaine en Europe et en Asie, et si les premiers combinés gPhone parviennent à conquérir une base d'utilisateurs étendue, les développeurs pourraient se concentrer sur ces deux plates-formes par simple mesure d'économie. En effet, alors que le marché des ordinateurs repose sur trois systèmes d'exploitation largement répandus, l'industrie du mobile, avec pas moins de 40 systèmes différents, est vraiment morcelée. Seuls quelques-uns, tels que Symbian, Windows Mobile de Microsoft, Palm et Blackberry, offrent aux développeurs une plate-forme pour laquelle ils peuvent concevoir des applications qui fonctionneront sur différents appareils sans qu'il soit nécessaire de trop les personnaliser.
Par conséquent, les plus petits éditeurs de logiciels se voient contraints de créer de multiples versions de la même application pour la rendre compatible, ne serait-ce qu'une petite partie seulement des centaines de modèles de combinés disponibles sur le marché, un processus pour le moins inefficace. "C'est extrêmement coûteux", nous explique Jason Whitmore, directeur général du service appareils mobiles deWind River, fabricant de logiciels pour téléphones mobiles. Mais si le marché se concentre autour de certaines plates-formes, dont celles d'Apple et de Google, les coûts et le temps nécessaire à la finalisation du produit avant commercialisation pourraient tous deux être réduits de 30 %.
Un autre bouleversement de taille se profile dans cette industrie, qui pourrait bien consolider la position des développeurs. Aujourd'hui, les consommateurs choisissent leur opérateur en fonction de la qualité du service téléphonique, d'après J.D. Power & Associates, qui, comme BusinessWeek, est une société du groupe The McGraw Hill Companies. Mais face à l'expansion et à l'amélioration continue de la couverture sans fil assurée par les opérateurs réseau tels que Verizon Wireless ou Sprint, la qualité d'appel est de moins en moins problématique. Lors d'une étude réalisée en septembre auprès de 25 000 consommateurs, J.D. Power a constaté que les utilisateurs de téléphones portables n'étaient victimes d'appels interrompus ou de problèmes de qualité sonore que 15 fois sur cent appels, soit une baisse d'un tiers par rapport à l'étude menée l'année précédente, qui avait dénombré 21 événements de ce type pour 100 appels.
À l'avenir, les logiciels passeront avant le service
La qualité des appels étant de plus en plus une constante, les achats de téléphone pourraient, de façon croissante, être motivés par les fonctionnalités particulières offertes par tel ou tel appareil. L'iPhone en est la preuve éclatante. Alors que la croissance du nombre d'abonnés ralentit, le partenaire américain d'Apple vient d'annoncer les meilleurs résultats trimestriels de son histoire. L'effectif des abonnés de AT&T (partenaire exclusif d'Apple) a augmenté de 1,2 million, grâce en grande partie au design et aux applications ultramodernes de l'iPhone, du Wi-Fi au navigateur Internet, en passant par l'iPod intégré. La qualité d'appel garantie par AT&T n'a pas grand-chose à voir là-dedans. En fait, bien que la qualité du service offert par la compagnie soit perçue comme moins bonne, plus de 40 % des personnes qui ont acheté un iPhone ont changé d'opérateur pour obtenir l'appareil.
Selon Michael Mahoney, directeur général du conseiller en investissement FalconPoint Capital, d'ici douze ou dix-huit mois, "le choix des consommateurs sera déterminé par les logiciels plus que par le service". Les compagnies qui attirent les développeurs de logiciels triompheront à long terme. La croissance et le prix plus élevé iront au produit qui sera doté des meilleurs logiciels.
Il est intéressant de constater que la menace naissante qui fragilise les recettes des grandes compagnies de l'industrie du mobile pourrait être alimentée par les efforts déployés par ces dernières pour contrer les attaques d'Apple et de Google. L'arrivée d'un appareil aussi original et populaire que l'iPhone va, à n'en pas douter, pousser les fabricants de portables et les opérateurs à expérimenter de nouveaux concepts et modèles d'entreprise. "Comparé à l'iPhone, toutes les interfaces utilisateur des portables semblent terriblement dépassées", écrivait en octobre dernier Richard Windsor, analyste de Nomura.
Les seigneurs du mobile contre-attaquent
En réponse à ces concurrents émergents, les opérateurs, les fabricants de combinés et les grands producteurs de logiciels pour mobiles fourbissent leurs armes. Certains opérateurs investissent dans des logiciels libres : Vodafone et le japonais NTT DoCoMo ont récemment fondé conjointement LiMo, qui figure parmi la vingtaine de dérivés de Linux pour mobile. Et lorsqu'un autre fournisseur de Linux mobile dénommé Trolltech a commercialisé en juin un nombre limité de combinés pour que les développeurs laissent libre cours à leur imagination, on a constaté que "les opérateurs en avaient acquis une quantité étonnamment importante", révèle Benoit Schillings, responsable de la technologie chez Trolltech.
Symbian, dont l'actionnaire majoritaire est Nokia, a déjà rassemblé le plus grand groupe de développeurs de logiciels pour mobile, avec près de 75 000 développeurs enregistrés. Aujourd'hui, elle tente de rendre leur participation moins onéreuse. En octobre, elle a commencé à autoriser les développeurs à enregistrer leurs applications plus rapidement et à moindre coût : 20 dollars (15 euros) l'unité, au lieu de plusieurs centaines de dollars auparavant. Microsoft tente quant à lui de rendre Windows Mobile plus attrayant à travers des alliances innovantes. Le 24 octobre, le fabricant de puces électroniques Qualcomm a annoncé qu'il produirait un jeu de puces pour téléphone intelligent intégrant le système d'exploitation Windows Mobile pour permettre aux fabricants de combinés de construire ces appareils à moindre coût.
Parmi ces derniers, Motorola a également mis en vente de nouveaux outils logiciels pour ses téléphones afin d'encourager le développement d'applications tierces, et Nokia compte également sortir un nouveau kit. Motorola a récemment racheté à Sony Ericsson 50 % des parts de UIQ, plate-forme basée sur Symbian. Ensemble, les fabricants de mobiles comptent augmenter les effectifs de la société de près de 50 % pour atteindre 500 personnes, explique Naresh Chouhan, responsable des programmes à destination des développeurs chez UIQ. "Ces deux actionnaires considèrent UIQ comme une plate-forme hautement stratégique", nous dit-il, avant d'ajouter : "Ils nous encouragent et nous financent. À l'avenir, je souhaite être capable de concurrencer Apple et Google".
Craig Hockenberry, développeur de logiciels pour Mac, n'a jamais été attiré par la création d'applications pour téléphones mobiles. "C'est beaucoup de négociations pour peu d'argent", en comparaison de ce que rapporte la conception de logiciels pour ordinateurs, dit-il, dans la mesure où les programmeurs ont toujours dû satisfaire une interminable liste d'exigences établies par les opérateurs mobiles, les fabricants de combinés et autres éditeurs de logiciels.
Les possesseurs de téléphones mobiles se comptant par milliards, les fabricants de logiciels petits et grands lorgnent depuis longtemps sur le marché du mobile, qu'ils considèrent comme une formidable opportunité de croissance. Toutefois, ils ont découvert que les marges bénéficiaires généreuses que génère la création de logiciels pour les ordinateurs individuels ou les fournisseurs d'accès à l'Internet sont bien plus minces au royaume du portable. S'ils doivent rarement payer un fabricant d'ordinateurs ou un fournisseur d'accès quand leurs programmes sont utilisés sur leurs machines où leurs réseaux, les éditeurs de logiciels voient de nombreuses mains se tendre à chaque coin de l'industrie du sans fil pour réclamer leur dû.
Ainsi, un développeur qui crée une sonnerie pour téléphone portable à partir d'une chanson existante ne percevra que 5 % des recettes que sa vente génère, les opérateurs s'en réservant une proportion très importante, en plus de celle revenant aux artistes et aux studios. Si ce ne sont pas eux qui prélèvent leur part, ce sont les fabricants de combinés ou le créateur du système d'exploitation de l'appareil. Parfois, ils sont même plusieurs à soutirer des recettes complémentaires aux développeurs d'applications. "L'écosystème n'est pas sain", explique Daren Tsui, directeur général de mSpot, éditeur de logiciels pour mobiles qui a choisi de s'allier aux opérateurs pour installer ses applications musicales et vidéo sur les téléphones portables. Ces contrats signés avec six compagnies nord-américaines ont généré deux millions d'abonnés mensuels. Cependant, malgré le succès de sa société, M. Tsui estime que "la communauté des développeurs crie pratiquement famine".
Apple crée une ouverture
Aujourd'hui, Apple et Google tentent d'apaiser un peu leur faim. En février, la marque à la pomme publiera un kit de développement logiciel ( BusinessWeek 16/10/2007) permettant aux programmeurs indépendants de concevoir des applications pour l'iPhone. Comme cet appareil coûte environ 140 euros de plus qu'un téléphone normal, ceux qui l'achètent sont susceptibles de souscrire à des prestations mensuelles haut de gamme plus onéreuses. Les développeurs espèrent qu'Apple et ses partenaires exclusifs (les opérateurs mobiles) auront à coeur de satisfaire cette demande enproposant des services et des applications conçues et réalisées par des tiers. Le gâteau étant plus gros, ils espèrent que le géant informatique et ses partenaires leur en réserveront un plus beau morceau.
L'ouverture de l'iPhone, fruit de mois de lobbying intensif de la part des programmeurs, est également plus alléchante pour ces derniers. Dans la mesure où l'iPhone est construit sur le même système d'exploitation que les ordinateurs Macintosh, la transition n'en sera que plus facile pour les concepteurs familiarisés avec les outils de développement Mac.
Quand le kit de développement aura été mis à disposition de ses destinataires, Craig Hockenberry, entre autres, compte réaliser une version pour l'iPhone de Twiterrific, une application Mac permettant aux utilisateurs du réseau social Twitter.com de lire et d'afficher des posts. "D'ici au mois de février, on pourrait assister à un raz-de-marée de logiciels iPhone", nous a indiqué Richard Doherty, directeur du cabinet de conseil The Envisioneering Group.
Google est sur les rangs
Dans le même temps, Google devrait lancer un nouveau système d'exploitation pour appareils mobiles, dénommé gPhone, afin d'étendre à ce marché sa très profitable activité de recherche et de publicité ciblée. Dans le cadre de cette stratégie, Google publiera un kit de développement logiciel pour dynamiser le développement d'applications et de services tiers innovants qui devraient attirer les consommateurs vers les appareils fonctionnant sous gPhone.
L'une des fonctionnalités de cette plate-forme, dénommée gPay, devrait, en permettant aux utilisateurs de payer leurs services par texto, simplifier le commerce pour les fournisseurs tiers. Aujourd'hui, les opérateurs font en sorte que le paiement des transactions passe par la facture mensuelle de leurs abonnés, prélevant près de la moitié des recettes pour jouer ce rôle d'intermédiaire pourtant indésirable entre consommateurs et développeurs. Si Google introduit un système de facturation alternatif moins coûteux pour ces derniers, "nous pourrions vraiment nous épanouir", déclare M. Tsui, de mSpot.
Google pourrait également lever les obstacles et les charges financières auxquels les éditeurs sont confrontés en offrant un réseau sans fil alternatif sur lequel la sélection d'applications disponibles pour les usagers ne sera pas étroitement contrôlée par les opérateurs mobiles. La firme américaine a récemment annoncé qu'elle pourrait se porter acquéreuse de licences de téléphonie mobile au début de l'année 2008 pour mettre sur pied, probablement avec un partenaire, un nouveau réseau sans fil n'imposant aucune restriction quant aux applications utilisables par les abonnés.
Les petits développeurs comptent en bénéficier
Si l'iPhone continue de gagner en popularité, notamment lors de son introduction prochaine en Europe et en Asie, et si les premiers combinés gPhone parviennent à conquérir une base d'utilisateurs étendue, les développeurs pourraient se concentrer sur ces deux plates-formes par simple mesure d'économie. En effet, alors que le marché des ordinateurs repose sur trois systèmes d'exploitation largement répandus, l'industrie du mobile, avec pas moins de 40 systèmes différents, est vraiment morcelée. Seuls quelques-uns, tels que Symbian, Windows Mobile de Microsoft, Palm et Blackberry, offrent aux développeurs une plate-forme pour laquelle ils peuvent concevoir des applications qui fonctionneront sur différents appareils sans qu'il soit nécessaire de trop les personnaliser.
Par conséquent, les plus petits éditeurs de logiciels se voient contraints de créer de multiples versions de la même application pour la rendre compatible, ne serait-ce qu'une petite partie seulement des centaines de modèles de combinés disponibles sur le marché, un processus pour le moins inefficace. "C'est extrêmement coûteux", nous explique Jason Whitmore, directeur général du service appareils mobiles deWind River, fabricant de logiciels pour téléphones mobiles. Mais si le marché se concentre autour de certaines plates-formes, dont celles d'Apple et de Google, les coûts et le temps nécessaire à la finalisation du produit avant commercialisation pourraient tous deux être réduits de 30 %.
Un autre bouleversement de taille se profile dans cette industrie, qui pourrait bien consolider la position des développeurs. Aujourd'hui, les consommateurs choisissent leur opérateur en fonction de la qualité du service téléphonique, d'après J.D. Power & Associates, qui, comme BusinessWeek, est une société du groupe The McGraw Hill Companies. Mais face à l'expansion et à l'amélioration continue de la couverture sans fil assurée par les opérateurs réseau tels que Verizon Wireless ou Sprint, la qualité d'appel est de moins en moins problématique. Lors d'une étude réalisée en septembre auprès de 25 000 consommateurs, J.D. Power a constaté que les utilisateurs de téléphones portables n'étaient victimes d'appels interrompus ou de problèmes de qualité sonore que 15 fois sur cent appels, soit une baisse d'un tiers par rapport à l'étude menée l'année précédente, qui avait dénombré 21 événements de ce type pour 100 appels.
À l'avenir, les logiciels passeront avant le service
La qualité des appels étant de plus en plus une constante, les achats de téléphone pourraient, de façon croissante, être motivés par les fonctionnalités particulières offertes par tel ou tel appareil. L'iPhone en est la preuve éclatante. Alors que la croissance du nombre d'abonnés ralentit, le partenaire américain d'Apple vient d'annoncer les meilleurs résultats trimestriels de son histoire. L'effectif des abonnés de AT&T (partenaire exclusif d'Apple) a augmenté de 1,2 million, grâce en grande partie au design et aux applications ultramodernes de l'iPhone, du Wi-Fi au navigateur Internet, en passant par l'iPod intégré. La qualité d'appel garantie par AT&T n'a pas grand-chose à voir là-dedans. En fait, bien que la qualité du service offert par la compagnie soit perçue comme moins bonne, plus de 40 % des personnes qui ont acheté un iPhone ont changé d'opérateur pour obtenir l'appareil.
Selon Michael Mahoney, directeur général du conseiller en investissement FalconPoint Capital, d'ici douze ou dix-huit mois, "le choix des consommateurs sera déterminé par les logiciels plus que par le service". Les compagnies qui attirent les développeurs de logiciels triompheront à long terme. La croissance et le prix plus élevé iront au produit qui sera doté des meilleurs logiciels.
Il est intéressant de constater que la menace naissante qui fragilise les recettes des grandes compagnies de l'industrie du mobile pourrait être alimentée par les efforts déployés par ces dernières pour contrer les attaques d'Apple et de Google. L'arrivée d'un appareil aussi original et populaire que l'iPhone va, à n'en pas douter, pousser les fabricants de portables et les opérateurs à expérimenter de nouveaux concepts et modèles d'entreprise. "Comparé à l'iPhone, toutes les interfaces utilisateur des portables semblent terriblement dépassées", écrivait en octobre dernier Richard Windsor, analyste de Nomura.
Les seigneurs du mobile contre-attaquent
En réponse à ces concurrents émergents, les opérateurs, les fabricants de combinés et les grands producteurs de logiciels pour mobiles fourbissent leurs armes. Certains opérateurs investissent dans des logiciels libres : Vodafone et le japonais NTT DoCoMo ont récemment fondé conjointement LiMo, qui figure parmi la vingtaine de dérivés de Linux pour mobile. Et lorsqu'un autre fournisseur de Linux mobile dénommé Trolltech a commercialisé en juin un nombre limité de combinés pour que les développeurs laissent libre cours à leur imagination, on a constaté que "les opérateurs en avaient acquis une quantité étonnamment importante", révèle Benoit Schillings, responsable de la technologie chez Trolltech.
Symbian, dont l'actionnaire majoritaire est Nokia, a déjà rassemblé le plus grand groupe de développeurs de logiciels pour mobile, avec près de 75 000 développeurs enregistrés. Aujourd'hui, elle tente de rendre leur participation moins onéreuse. En octobre, elle a commencé à autoriser les développeurs à enregistrer leurs applications plus rapidement et à moindre coût : 20 dollars (15 euros) l'unité, au lieu de plusieurs centaines de dollars auparavant. Microsoft tente quant à lui de rendre Windows Mobile plus attrayant à travers des alliances innovantes. Le 24 octobre, le fabricant de puces électroniques Qualcomm a annoncé qu'il produirait un jeu de puces pour téléphone intelligent intégrant le système d'exploitation Windows Mobile pour permettre aux fabricants de combinés de construire ces appareils à moindre coût.
Parmi ces derniers, Motorola a également mis en vente de nouveaux outils logiciels pour ses téléphones afin d'encourager le développement d'applications tierces, et Nokia compte également sortir un nouveau kit. Motorola a récemment racheté à Sony Ericsson 50 % des parts de UIQ, plate-forme basée sur Symbian. Ensemble, les fabricants de mobiles comptent augmenter les effectifs de la société de près de 50 % pour atteindre 500 personnes, explique Naresh Chouhan, responsable des programmes à destination des développeurs chez UIQ. "Ces deux actionnaires considèrent UIQ comme une plate-forme hautement stratégique", nous dit-il, avant d'ajouter : "Ils nous encouragent et nous financent. À l'avenir, je souhaite être capable de concurrencer Apple et Google".
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