"Non à un super régulateur européen des télécoms"
Un point de vue de Paul Champsaur, président de l'ARCEP, publié dans Les Echos du 20 février 2008
Le Parlement européen et le Conseil s'engagent dans l'examen des propositions de la Commission européenne visant à modifier le cadre réglementaire des communications électroniques. Idéalement, ce processus devrait aboutir à augmenter le bien-être du consommateur européen. Je crains qu'il ne conduise au contraire à des processus de décision déséquilibrés qui nuiront à une dynamique de progrès.
Le cadre européen réglementaire actuel a été bénéfique au secteur et aux consommateurs. En 2003, il y avait 23 millions d'abonnés au haut débit ; ils étaient plus de 74 millions à la fin 2006. Dans le même temps, le nombre des abonnés mobiles a crû de 370, à 495 millions (chiffres Idate sur l'Europe à 25), la convergence se généralise et de nouveaux modes de communication apparaissent. Tout cela est le fruit d'une concurrence dynamique et de prix en forte baisse. Pour le consommateur européen, la libéralisation des marchés des communications électroniques est un vrai succès.
Comment capitaliser sur cette réussite ? Pour l'essentiel, la Commission propose de bonnes idées : ne pas modifier substantiellement la régulation économique du secteur mais supprimer la régulation là où elle n'est plus nécessaire et renforcer l'indépendance des régulateurs nationaux, proches des attentes de leurs consommateurs et de leur marché. En effet, s'il a pleinement démontré sa capacité à faire face aux problématiques actuelles, le cadre réglementaire doit, à l'image des changements qui interviennent dans les marchés dynamiques dont nous avons la charge, savoir évoluer pour répondre aux questions du futur.
Sur un point néanmoins, les régulateurs européens pensent que les propositions de la Commission européenne sont mal conçues : l'Autorité européenne des marchés de communications électroniques (EECMA) qu'elle prévoit de créer ne fonctionnera pas. L'EECMA serait lourde et coûteuse, coupée de la réalité des marchés et, paradoxalement, enverrait un signal en contradiction avec l'idée sous-jacente de disparition progressive de la régulation sectorielle et de convergence vers le droit commun de la concurrence. Elle brisera en outre la dynamique de coopération positive enclenchée au sein d'un réseau de régulateurs européens indépendants, qui apporte son expertise à la Commission et dont le résultat des travaux est d'ores et déjà reconnu par le secteur.
En janvier, les régulateurs européens se sont prononcés à une forte majorité sur ce diagnostic et ont dessiné le cadre d'une solution alternative. Il ne s'agit pas de défendre le statu quo. Comme la Commission et comme ses homologues européens, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) considère que le rôle des régulateurs doit s'affirmer encore davantage en Europe. Le groupe des régulateurs européens, ou GRE, est prêt à assumer pleinement sa place et à contribuer vigoureusement à l'émergence d'un marché unique des communications électroniques en Europe. Pour cela, le GRE doit évoluer du réseau informel de régulateurs partageant les " bonnes pratiques " qu'il était à l'origine en une entité créée et reconnue en droit européen, dotée d'une gouvernance effective (les décisions pouvant par exemple être adoptées par vote avec majorité qualifiée), transparente et responsable de ses actes devant les institutions européennes compétentes.
La révision du cadre actuel offre cette opportunité : le réseau des régulateurs nationaux doit être renforcé par des responsabilités claires et des compétences élargies, exercées en collaboration étroite avec la Commission européenne. Le GRE et la Commission seront ainsi en mesure de contribuer vigoureusement à l'émergence d'un marché unique des communications électroniques en Europe. Plusieurs modèles juridiques peuvent être adaptés à cet objectif, par exemple celui du Comité des autorités de concurrence nationales, créé en 2003 par le Parlement européen et le Conseil, lui-même appuyé sur le réseau des autorités nationales de concurrence, reconnu par une déclaration conjointe du Conseil et de la Commission.
L'Arcep formule le voeu que le Parlement européen et le Conseil prennent l'initiative de faire évoluer la proposition de la Commission dans ce sens. Elle est prête, avec ses homologues européens, à leur apporter son concours pour que les consommateurs continuent de bénéficier d'innovations et de prix concurrentiels, et plus globalement que l'économie européenne profite des investissements dans les services de communications électroniques.
PAUL CHAMPSAUR est président de l'Arcep
Le Parlement européen et le Conseil s'engagent dans l'examen des propositions de la Commission européenne visant à modifier le cadre réglementaire des communications électroniques. Idéalement, ce processus devrait aboutir à augmenter le bien-être du consommateur européen. Je crains qu'il ne conduise au contraire à des processus de décision déséquilibrés qui nuiront à une dynamique de progrès.
Le cadre européen réglementaire actuel a été bénéfique au secteur et aux consommateurs. En 2003, il y avait 23 millions d'abonnés au haut débit ; ils étaient plus de 74 millions à la fin 2006. Dans le même temps, le nombre des abonnés mobiles a crû de 370, à 495 millions (chiffres Idate sur l'Europe à 25), la convergence se généralise et de nouveaux modes de communication apparaissent. Tout cela est le fruit d'une concurrence dynamique et de prix en forte baisse. Pour le consommateur européen, la libéralisation des marchés des communications électroniques est un vrai succès.
Comment capitaliser sur cette réussite ? Pour l'essentiel, la Commission propose de bonnes idées : ne pas modifier substantiellement la régulation économique du secteur mais supprimer la régulation là où elle n'est plus nécessaire et renforcer l'indépendance des régulateurs nationaux, proches des attentes de leurs consommateurs et de leur marché. En effet, s'il a pleinement démontré sa capacité à faire face aux problématiques actuelles, le cadre réglementaire doit, à l'image des changements qui interviennent dans les marchés dynamiques dont nous avons la charge, savoir évoluer pour répondre aux questions du futur.
Sur un point néanmoins, les régulateurs européens pensent que les propositions de la Commission européenne sont mal conçues : l'Autorité européenne des marchés de communications électroniques (EECMA) qu'elle prévoit de créer ne fonctionnera pas. L'EECMA serait lourde et coûteuse, coupée de la réalité des marchés et, paradoxalement, enverrait un signal en contradiction avec l'idée sous-jacente de disparition progressive de la régulation sectorielle et de convergence vers le droit commun de la concurrence. Elle brisera en outre la dynamique de coopération positive enclenchée au sein d'un réseau de régulateurs européens indépendants, qui apporte son expertise à la Commission et dont le résultat des travaux est d'ores et déjà reconnu par le secteur.
En janvier, les régulateurs européens se sont prononcés à une forte majorité sur ce diagnostic et ont dessiné le cadre d'une solution alternative. Il ne s'agit pas de défendre le statu quo. Comme la Commission et comme ses homologues européens, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) considère que le rôle des régulateurs doit s'affirmer encore davantage en Europe. Le groupe des régulateurs européens, ou GRE, est prêt à assumer pleinement sa place et à contribuer vigoureusement à l'émergence d'un marché unique des communications électroniques en Europe. Pour cela, le GRE doit évoluer du réseau informel de régulateurs partageant les " bonnes pratiques " qu'il était à l'origine en une entité créée et reconnue en droit européen, dotée d'une gouvernance effective (les décisions pouvant par exemple être adoptées par vote avec majorité qualifiée), transparente et responsable de ses actes devant les institutions européennes compétentes.
La révision du cadre actuel offre cette opportunité : le réseau des régulateurs nationaux doit être renforcé par des responsabilités claires et des compétences élargies, exercées en collaboration étroite avec la Commission européenne. Le GRE et la Commission seront ainsi en mesure de contribuer vigoureusement à l'émergence d'un marché unique des communications électroniques en Europe. Plusieurs modèles juridiques peuvent être adaptés à cet objectif, par exemple celui du Comité des autorités de concurrence nationales, créé en 2003 par le Parlement européen et le Conseil, lui-même appuyé sur le réseau des autorités nationales de concurrence, reconnu par une déclaration conjointe du Conseil et de la Commission.
L'Arcep formule le voeu que le Parlement européen et le Conseil prennent l'initiative de faire évoluer la proposition de la Commission dans ce sens. Elle est prête, avec ses homologues européens, à leur apporter son concours pour que les consommateurs continuent de bénéficier d'innovations et de prix concurrentiels, et plus globalement que l'économie européenne profite des investissements dans les services de communications électroniques.
PAUL CHAMPSAUR est président de l'Arcep
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