L'Assemblée met fin à des mois de débats en votant la loi Création et Internet
Après des mois de débats et de multiples rebondissements, l'Assemblée a adopté, mardi 12 mai, en nouvelle lecture le projet de loi Création et Internet qui prévoit de sanctionner le téléchargement illégal par une coupure de l'accès à l'Internet en cas de récidive.
Le texte a été adopté par 296 voix contre 233, mais la majorité UMP-Nouveau Centre n'a pas fait le plein de voix : sur 340 députés, 44 n'ont pas soutenu ce texte, qui aura provoqué un vrai débat de société.
"Je regrette qu'il n'y ait pas eu de majorité plus large", a d'ailleurs concédé la ministre de la culture, Christine Albanel. Le projet de loi doit être définitivement adopté mercredi par le Parlement lors d'un vote ultime au Sénat.
Une nouvelle Haute Autorité mise en place. La nouvelle Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur l'Internet (Hadopi) pourra alors envoyer ses premiers mails d'avertissement à l'automne, avant les premières suspensions en 2010.
Les députés PS ont déjà annoncé qu'ils saisiraient le Conseil constitutionnel, estimant en outre que le texte va à l'encontre du Parlement européen, qui s'est opposé la semaine dernière à toute coupure sans décision de justice préalable.
(Lire le compte rendu Téléchargement : le projet français incompatible avec l'européen et l'entretien avec Catherine Trautmann : "Avec Hadopi,
Polémiques. Patrick Bloche (PS) a de nouveau dénoncé mardi une "loi d'exception et d'intimidation", un texte "perdant pour les artistes, perdant pour les internautes et même perdant pour un cadre de TF1", allusion au licenciement d'un cadre de la chaîne, qui s'était prononcé contre le texte Hadopi dans un courrier privé, transmis à TF1 par le cabinet de Christine Albanel.
L'élu PS a encore dénoncé une loi "inefficace, dépassée, inapplicable", qui "retarde l'adaptation des droits d'auteur à l'ère numérique". Au PS, le seul a avoir voté pour, l'ex-ministre de la culture Jack Lang, a dit vouloir "s'opposer à l'expropriation et la spoliation des artistes".
(Lire le compte rendu Hadopi : le cadre de TF1 licencié contre-attaque et le débat Jack Lang : "Vous croyez que je suis heureux d'être en dysharmonie avec mes amis ?")
La majorité lave l'affront du 9 avril. Voulu par Nicolas Sarkozy, le texte avait alors été rejeté, à la surprise générale, faute de mobilisation suffisante de la majorité.
Mardi, six députés UMP ont voté contre, tandis que dix-sept ont choisi l'abstention, dont le rapporteur du budget médias, Patrice Martin-Lalande. Le texte aura également divisé le PS. Les députés ont voté contre avec constance mais les sénateurs socialistes ont voté pour puis se sont abstenus.
Ils ne devaient pas prendre part au vote mercredi. (Lire le décryptage Création et Internet : l'Elysée ne tolérera pas un nouveau revers)
La discussion a pénétré les strates de la société civile, avec moult tribunes libres des premiers concernés, les artistes. Dernière en date, celle du réalisateur Eric Rochant dans Le Monde daté de mercredi : "la loi Hadopi est probablement l'une des plus stupides qu'il ait été donné au Parlement d'adopter."
Mais la plupart des artistes, même de gauche, ont pris la défense du texte, comme le cinéaste Luc Besson ou l'acteur Michel Piccoli. La majorité n'a pas boudé son plaisir de diviser la gauche et les artistes.
Hadopi, et après ? S'il ne fait quasiment aucun doute que le projet de loi sera accepté par le Sénat mercredi, les questions soulevées par le texte n'auront pas toutes été résolues pour autant.
Outre sa remise en cause par le Parlement européen, le dispositif est déjà mis à mal par de nombreux internautes qui mettent en ligne leurs conseils pour détourner Hadopi.
(Lire le décryptage : Questions sur le projet de loi Hadopi et l'éclairage La "résistance" s'organise pour l'après Hadopi ; écouter le radiozapping Hadopi : une loi pour rien ?)
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